SYRIE - LIBAN

En entrant à Beyrouth, nous pénétrons aussi dans la complexité de la situation politique du Liban et du Moyen Orient.

Une situation qui provient non seulement d’un long processus historique mais aussi de l’implication des puissances alentours. Le Liban est le terrain de jeu des intérêts politiques et stratégiques de la région. Pourtant, il est incroyable de réaliser que dix-sept religions cohabitent dans ce pays. Exemple de respect mutuel durant des années, nous nous rendons compte de la richesse que représente cette multiconfessionnalité.

Les habitants nous diront qu’en dehors des zones d’intérêts stratégiques et politiques, les communautés s’entraident au-delà de leur appartenance religieuse. Toujours est-il que nous sommes impressionnés de la place incontournable que prend chaque religion au sein des villages. Nous pouvons observer les églises, à côté des mosquées. Les symboles sont souvent affichés sur les personnes elles-mêmes, un voile, une croix, l’habillement spécifique de la population druze : des pantalons noir dont l’entrejambe arrive à la hauteur de genoux et qui se ressert sur les chevilles ainsi qu’une sorte de capet blanc.

Pourtant à Beyrouth c’est aussi l’image terrible d’une destruction massive, d’une poudrière qui s’est enflammée durant plus de quarante ans. Etonnés par la vision de ces immeubles massivement reconstruits depuis la dernière destruction de la ville en 2006, il n’empêche que l’un des symboles du Liban, la statue de la Place des Martyrs est criblée de balle. Celle-ci illustre le no man lands et l’une des lignes de démarcation qui coupait Beyrouth. Les immeubles neufs s’alternent avec les bâtiments détruits et les impacts de balle sont largement visibles dans toute la ville. Une autre particularité de Beyrouth est cet ancien cinéma, ressemblant à un œuf, il est à nouveau un symbole illustrant les années de guerre civile. Naoly nous indiquera aussi la tour où les snipers maronites étaient postés, de jeunes hommes qui ont sautés du dernier étage lorsque l’immeuble fût encerclé. C’est l’histoire de toutes ces familles, de divers horizons et religions qui aujourd’hui vivent côte à côte. De toute une population d’immigrés, aujourd’hui plus nombreuses que les habitants du Liban, qui ont quittés leur pays natal pour reconstruire une nouvelle vie, sans oublier pour autant leur pays. Au Liban, on sent une réelle force de vivre dans les rues et elle est surprenante, elle est déroutante par son mode de consommation, et par son show. Mais elle nous émeut par la capacité qu’à cette population de se relever et de renaître de ses cendres. L’esprit de liberté qui flotte dans ses rues est à l’image du rocher aux pigeons, un autre emblème de cette ville.

Nous avons retrouvé cet esprit de liberté sur notre chemin au col de Masser El Chouf. Là-bas, les cèdres centenaires sont majestueux, ils nous ancrent à cette terre et nous apportent un sentiment de sérénité. Dominant toute la vallée, ils sont les rois de ce pays.

Alors que nous écrivons ces quelques lignes, la situation politique se détériore. Nous avons quitté le territoire le jour avant que la moitié du gouvernement démissionne. Interloqué par la société de consommation à Beyrouth, certains libanais nous dirons qu’ils profitent au maximum des moments de vie que jamais personne ne pourra leur prendre. Cette force de vie personne ne pourra la leur prendre non plus. Pourtant aujourd’hui nous espérions de tout cœur pour ses habitants que la situation ne se dégradera pas davantage.