TADJIKISTAN

Crossing in the wild and infinite spaces of the Pamir

Nous descendons à vive allure, puis nous nous retournons. Elles sont là, les imposantes et majestueuses montagnes du Pamir, celles que nous venons de traverser. Elles sont saupoudrées de neige fraîche qui donne à leurs lignes, à leurs arrêtes, cette blancheur immaculée, ce rayonnement scintillant. Pourtant, leurs hauts sommets à plus de 7'000 m sont encore dans les nuages, les nuages noirs de l’orage.

Nous venons de franchir notre dernier col à 4’300m d’altitude et nous sommes dans la descente vers les plateaux du Kirghizstan. Nous sentons en nous la magie de cette traversée, la force tranquille qui nous habite.

Le Tadjikistan aura été un hymne, un hymne à cette nature sauvage et puissante, celle qui nous élève à ce qu’il y a de plus somptueux en nous, cette force de vivre apaisée de la contemplation et du sentiment d’unité à tout ce qui nous entoure. Nous ne faisons plus qu’un relié à chaque élément de la Terre.

Cette paix intérieure s’est installée progressivement, au fur et à mesure de notre ascension. Tout d’abord, nous avons rencontré les gigantesques arbres à notre entrée sur Douchanbe, ces êtres de sagesse, qui apaisent par leur présence, ancrée dans la Terre depuis des siècles, donnant sans limitation ce qu’ils ont à offrir à qui le veut.

Puis, nous traversons de verts pâturages qui nous emportent vers les monts et montagnes. Nous roulons à travers les petits villages où les cris enjoués des enfants résonnent dans les vallées. Nous longeons des vallons qui se resserrent pour terminer dans des gorges aux eaux rouges et tumultueuses.

Nous passons dans des parois verticales sur des pistes en terre pour attendre semble-t-il le gardien du passage, une magnifique face aux lignes géologiques qui s’imposent dans toutes sa grandeur. La nature déjà nous émeut…. C’est aussi comme ce petit lac cristallin dans lequel nous nous baignons avant d’entamer notre premier col sur un chemin rocailleux. Une longue montée qui nous permet de distinguer les premiers contreforts de la chaîne du Pamir, avant de réaliser une descente vertigineuse sur Kalaikum.

Nous poursuivons, ensuite, dans des canyons où le vent résonne, des canyons où la puissance d’une eau turbulente produit un bruit sourd, qui nous rappelle sans cesse sa présence. Nous nous sentons tout petit dans ces passages au centre de la roche. Pourtant de l’autre côté de la rive, se dessine la vie d’un autre peuple, celui de l’Afghanistan. Un autre monde aux maisons en terre et aux toits plats, les hommes en tunique et les femmes voilées… Des caravanes de chameaux et d’ânes amènent le long de petits sentiers, la marchandise de villages en villages, là où il n’y a pas d’autres passages. Une vie, qui nous semble-t-il, d’un autre monde, d’un autre temps.

Le Tadjikistan a passé par de dures épreuves, sa récente guerre civile, ses deux famines consécutives, pourtant sa population n’a en rien perdu son sens de l’hospitalité et notre entrée dans une maison Pamiri nous emmène à découvrir un autre univers. Une fosse centrale est entourée de cinq piliers en bois représentant les cinq Imams de l’Islam Chiite et une lucarne sur le toit permet à la lumière de pénétrer la maison, passant à travers quatre carreaux symbolisant les quatre éléments ; Terre, Feu, Air, Eau. La chaleur humaine de cette demeure sera amplifiée par ce petit déjeuner de thé au lait et beurre salé où l’on fait tremper le pain fait main par la famille. Incroyable partage où nos sens sont stimulés par les odeurs, les gouts, les saveurs et la musique locale. C’est aussi remarquable de rencontrer ces personnes qui vivent avec aussi peu de variétés alimentaires, les fruits et les légumes ne poussant pas à cette altitude.

La vallée du Wakhan nous ouvre les bras et chaque vallée latérale laisse percevoir des sommets fleuretant avec des altitudes où l’oxygène se fait rare. Ils sont majestueux et imposants, leurs cimes se dessinent dans toute leur grandeur. C’est magique.

Nous prenons de l’altitude sur une piste en sable qui nous oblige à pousser nos vélos. Le souffle court et l’effort nous imposent le calme, comme la quantité de mouche et de moucherons qui nous poursuivent. Un effort récompensé à notre premier col à plus de 4'000m avec la vue sur la chaîne de l’Hindu Kuch qui se dessine jusqu’au Pakistan. Et, c’est à ce moment, que nous entrons réellement dans cette hauteur, cette élévation en altitude qui nous amène à nous connecter encore plus fortement avec notre âme. L’esprit, ici, est en Paix.

Nous nous arrêtons devant le lac Sassyk, une étendue bleue profonde dans une vaste steppe où les sommets alentours sont magistraux. Le matin, le soleil vient réchauffer la tente et enfuit dans nos sacs de couchages, nous contemplons la vie qui se dévoile sous nos yeux, le jeu de lumière qui fait apparaître chaque détail, découvre les nouvelles lignes d’horizons, les nouvelles crêtes, les divers plans. Dans cette nature sauvage, nous sentons l’appel du grand large, de ces espaces indomptés.